jeudi 5 mars 2015

Vie des martyrs par Georges Duhamel, publiée chez René Kieffer en 1924.


Georges Duhamel (1884-1966), à peine obtenu son diplôme de médecin, fut mobilisé comme chirurgien dans une ambulance du front au début de la "Grande Guerre". De cette terrible expérience, il a rapporté un livre injustement oublié de nos contemporains "La vie des martyrs". C'est cet ouvrage que je vous propose aujourd'hui à la vente. Publié chez René Kieffer en 1924, il s'agit ici d'une édition remarquablement illustrée par Paul Baudier.


Voici un témoignage terriblement pathétique sur  l'immense tragédie physique et humaine de la guerre, la souffrance et l’héroïsme de milliers de blessés qu'il a croisés. André J. Fabre dans un excellent article consacré à Duhamel nous dit qu'il s'agit, en même temps, d'un hymne à la pitié mais une pitié qui n'est pas une embrassade larmoyante mais une compassion au sens étymologique du terme : souffrir avec... Il est alors intéressant de confronter "La Vie des martyrs" aux autres témoignages qui sont parus à cette l'époque. Et ils sont nombreux !


Henri Barbusse en 1914, âgé de 41 ans et malgré des problèmes pulmonaires, s'engage volontairement dans l'infanterie (malgré ses positions pacifiques d'avant-guerre) et réussit à rejoindre les troupes combattantes en décembre 1914 au 231e régiment d'infanterie avec lequel il participe aux combats en premières lignes jusqu'en 1916. Il en ramène un livre "Le Feu", qui obtiendra le prix Goncourt. De son côté, Roland Dorgelès obtint pour son œuvre "Les Croix de bois" le Prix Fémina en 1919. Maurice Genevoix dans "Ceux de Quatorze" évoque aussi ses souvenirs. Il n'avait que 24 ans lorsqu'il prit le commandement d'une compagnie au mois d'août 1914. Jour après jour, tandis que se tissaient des relations faites d'entraide et de peur, il fit face à l'horreur des combats, des cadavres mutilés, de l'inimaginable. Trois balles le blessèrent grièvement et mirent fin au cauchemar. Un récit de guerre bouleversant.


Ernest Hemingway, publie en 1929 son "Adieu aux armes". La encore, il s'agit d'un récit autobiographique dont l'action se déroule en Italie pendant la Première Guerre mondiale. Dans un style froid et laconique, Hemingway dépeint une guerre futile et destructrice, le cynisme des militaires et l'indifférence de populations. Ernst Junger, du côté allemand, publie en 1920, "Orages d'acier", récit autobiographique qu'il a vécu comme soldat de bout en bout…


Il y a aussi Léon Lecerf dont les carnets du front ont été publiés par ses descendants sous le titre : "L'œil et la plume, Carnets du Docteur Léon Lecerf, médecin et photographe de la Grande Guerre ". Et puis d'autres encore comme Axel Munthe, Erich Maria Remarque avec son best-seller autobiographique " À l'Ouest, rien de nouveau", Romain Rolland avec une série de pamphlets intitulée "Au-dessus de la mêlée", etc…


On est toujours surpris de constater que ces récits, œuvres des plus éminents écrivains de ce siècle, unanimement couronnés d'un légitime succès d'édition, lus par les plus grands de ce monde, n'aient jamais empêché la survenue d'une deuxième guerre mondiale quelques années plus tard, tout aussi horrible que la première ! La guerre est-elle une part de la nature humaine ou ne survient-elle que dans certaines circonstances socio-culturelles ? Vie des martyrs, sous-titré 1914-1916, est le premier roman de Georges Duhamel publié au Mercure de France en 1917. Ce roman préfigure le suivant Civilisation pour lequel son auteur obtiendra le Prix Goncourt en 1918… Pierre


DUHAMEL Georges. Vie des martyrs. Illustrée d'eaux-fortes (20) et de gravures sur bois de Paul Baudier. Paris, René Kieffer 1924. Un volume grand in-8 (25,5 x 17 cm). Broché sous couverture rempliée. Tirage à 580 exemplaires, un des 500 sur papier vélin. Chaque page est agrémentée d'un bandeau tiré en rouge sombre, nombreuses petites vignettes, en-tête et culs-de -lampe gravés sur bois et 20 gravures à l'eau-forte H.T. avec remarques. 190 € + port

2 commentaires:

calamar a dit…

ces livres sont poignants, et le fait que certains d'entre eux (la Vie des martyrs, le Feu) aient été publiés pendant la guerre en question, montre bien qu'ils n'ont malheureusement aucune influence...
au passage, le fameux "bourrage de crâne" dont on nous dit qu'il était important, n'allait pas jusqu'à atteindre ces témoignages.

Pierre a dit…

Ces livres ne seraient-ils qu'un exutoire pour soulager notre mauvaise conscience ?

Par moment, je finis par comprendre les "taiseux", les "A quoi bon ?". Et puis ma capacité d'indignation reprends le dessus... Pierre